Pour une mobilisation collective en faveur des jeunes sortant de l’Aide sociale à l’enfance
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Véronique Guillermo, Bruno Lucas, Gaëlle Turan-Pelletier et Frédéric Turblin (Igas)
Avec la participation de Lisa Bernanos, membre du pôle data de l’Igas
Le rapport d’évaluation de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le parcours des jeunes majeurs, au moment de leur sortie de l’aide sociale à l’enfance, s’appuie notamment sur le contrôle de quatre départements : Eure-et-Loir, Haute-Garonne, Puy-de-Dôme et Pyrénées-Orientales.
Que deviennent les jeunes majeurs, lorsqu’ils ne sont plus suivis par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) ? Ont-ils été préparés à vivre en toute autonomie ? La loi n°2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants a créé le droit à la poursuite d’un accompagnement après la majorité et jusqu’à 21 ans des jeunes sortant de l’ASE qui ne bénéficient pas de ressources ou d’un soutien familial suffisant. La loi prévoit également un ensemble d’outils concourant à la bonne insertion sociale et professionnelle des jeunes. Dans un contexte de difficultés structurelles de l’ASE, la mission d’inspection avait pour objectif de contrôler la mise en œuvre du cadre normatif et d’évaluer la politique menée par les conseils départementaux et leurs partenaires. Ce nouveau format de rapport d’évaluation thématique est nourri de quatre rapports de contrôle départementaux et permet de confronter des constats nationaux à une diversité de pratiques ancrées dans les territoires.
Une application disparate de la loi
Le rapport met en évidence que les départements consacrent des moyens importants à l’accompagnement après 18 ans (estimés à 1,2 Md€), dont ils ne contestent pas le principe, mais qu’ils accompagnent les jeunes de façon très disparate. Les outils prévus par la loi sont partiellement mis en œuvre et les départements ne respectent pas tous l’inconditionnalité de l’accompagnement.
Dans les départements contrôlés, le taux de poursuite en accueil provisoire jeune majeur, indicateur qui fournit une information sur le taux d’accompagnement combiné à sa durée, est compris entre 29 % et 71 % en 2023 (51 % en moyenne nationale), les durées d’accompagnement sont également très variables (entre 12 et 25 mois), et sont assorties de pratiques contrastées de fréquence de renouvellement des « contrats jeunes majeurs » (entre 4 et 8 mois par contrat). La mobilisation partenariale est également variable d’un département à l’autre.
Développer des voies d’accès privilégiées au droit commun pour les jeunes avant et après 21 ans
Aujourd’hui, les parcours des jeunes sortant de l’ASE sont émaillés de difficultés, la marche d’accès vers le droit commun reste souvent trop haute : dès lors, il convient de développer, avant et après 21 ans, des voies d’accès privilégiées pour que les jeunes puissent effectivement faire valoir leurs droits, accéder à un logement, être soignés ou accompagnés par le secteur médico-social.
La mission recommande également qu’aux côtés des départements, l’Etat et tous les acteurs contribuant à l’insertion des jeunes, notamment les acteurs du logement, les missions locales, la branche famille, l’assurance maladie, les agences régionales de santé et les maisons départementales pour les personnes handicapées se mobilisent. Le rapport préconise notamment que l’Etat développe, au niveau national et local, les instances et les outils de suivi des parcours des jeunes sortant de l’ASE.
Le rapport propose également de développer, dans chaque département :
- des structures co-financées par l’Etat permettant d’accompagner les jeunes en rupture avec les institutions ;
- des services de suites destinés aux jeunes sortis de l’ASE.